De longues, trèèèès longues démarches qui aboutissent enfin ! On aura tout eu depuis qu’on a déposé notre dossier à l’urbanisme : les couacs habituels (mauvaises informations ou informations introuvables, incompréhensions, absence de personnel…) et les évènements exceptionnels ou rarissimes (changement de l’équipe de mairie, arrêt des démarches administratives pour cause de confinement, piratage informatique des ordinateurs de la mairie…) Au total, pour un dossier que nous avons commencé à constituer en janvier et dont nous venons d’avoir la réponse définitive de l’urbanisme en novembre, il nous aura donc fallu 11 mois, je pense que c’est un record ! Heureusement que nous avions présenté notre projet au maire et qu’il y a toujours été favorable ! Il faut avoir le cœur bien accroché pour vivre tous ces grands 8 émotionnels !
Mais ça y est, dans moins d’une semaine je signerai avec ma famille l’acte d’achat de cette maison dans laquelle s’implantera l’école. Les travaux vont pouvoir commencer, tout ce que nous avons, avec le collectif, pensé et posé sur le papier, va pouvoir prendre forme, prendre vie. La naissance d’une école alternative se déroule sous mes yeux, j’y prends part et je vais même en être la directrice…
Si on m’avait dit ça il y a 5 ans ! Je n’y aurais pas cru, personne dans mon entourage n’y aurait cru. D’ailleurs, je suis intimement convaincue que personne n’y croit encore vraiment. Rien n’est fait, la première pierre n’est pas encore vraiment posée. Pourtant ça y est, je le sais au plus profond de moi-même : la vie ne m’a pas mis là par hasard. Et j’accepte cette place parce que je sais que j’y ferai ce qui me correspond, ce qui m’est cher, ce pour quoi nous nous sommes retrouvés autour de ce projet : je ferai ma part pour que les adultes changent le regard qu’ils portent sur les enfants et les adolescents, qu’ils les considèrent davantage sur un pied d’égalité avec eux-mêmes.
Je sais que ce ne sera pas facile, je sais que même si j’ai déjà mis bien plus d’énergie dans ce projet que ce que je ne l’aurais imaginé, ce n’est rien face à ce qui vient.
Mais je sais aussi que ce projet m’a déjà apporté beaucoup plus que je ne l’aurais imaginé, et que ça aussi, ce n’est rien par rapport à ce qui vient.
Quoi qu’il en soit, je n’ai pas le choix ! On n’a plus le choix quand on estime qu’un projet en vaut vraiment la peine, on donne tout ce qu’on peut. La vie s’est amusée à m’attribuer un rôle que je n’avais pas vraiment prévu d’avoir…
Il y a 5 ans j’étais « instit’ » (bien que ce mot ne soit absolument pas de ma génération, je n’ai jamais pu me résoudre à utiliser le mot d’« enseignante » ou « professeur des écoles »…) en maternelle, dans le système public. J’aimais mon boulot mais j’étais épuisée par les conditions de travail. Avec mes collègues, on voulait toutes faire autre chose, ne pas faire ce métier jusqu’à la retraite, c’était souvent notre thème de discussion pendant la pause déjeuner.
Et puis il y a eu Théo, mon fils. Il transformait mes doutes en certitudes : les conditions d’accueil dans les écoles où j’avais travaillé n’étaient vraiment pas adaptées aux besoins d’un enfant, de surcroît, un tout-petit. Je n’ai jamais pu me résoudre à reprendre le chemin de mon école, à participer à nouveau à un système si peu respectueux des enfants.
J’ai donc consacré mon cœur et mon temps, en premier lieu à Théo. Au fil du temps, avec lui, j’ai découvert le maternage, le portage, la motricité libre, la diversification menée par l’enfant…*.
Alors que je pensais apporter un enseignement adapté à mes élèves de maternelle, j’ai vu Théo apprendre bien des choses du programme de petite et moyenne section, bien avant l’âge d’entrée en maternelle. Pourtant, j’ai toujours pensé que si Théo le faisait, tout enfant dans les mêmes conditions, en était capable, mon fils n’a rien d’exceptionnel. Cette idée m’était confirmée par mes lectures et mes recherches. Alors que j’estimais avoir eu une bonne formation à l’IUFM, je me plongeais donc dans la découverte des pédagogies alternatives dont je ne savais pratiquement rien.
Quand Théo a eu un an, j’ai vu le film DEMAIN et découvert qu’on pouvait participer à changer le système éducatif, qu’on pouvait créer des écoles. Alors, j’ai trouvé où mettre mon énergie, vers quoi allait mon élan naturel : un projet collectif de création d’une école ! Si d’autres l’avaient fait, nous pouvions le faire aussi !
Presque 4 ans ont passé depuis que j’ai poussé la porte du CMPP dans lequel avait été organisé la première grande journée d’information sur les écoles démocratiques à Marseille , une journée passionnante et enthousiasmante pour moi qui n’avais jamais entendu parlé de telles structures. J’ai tout de suite voulu aider, faire quelque-chose pour participer au projet…
En 4 ans, les évènements m’ont amenée à m’investir complètement dans ce projet, j’ai même pris un micro et parlé devant une assemblée de personnes intéressées, moi qui bafouille et rougis à chaque présentation individuelle dans un groupe… 4 années qui ont donc eu leur lot de joies et de doutes, 4 années où il m’a fallu faire des choix cruciaux qui impactaient fortement ma vie de famille. Mais je l’ai déjà dit, je n’avais qu’une impression de faire des choix, parce que toute réflexion se terminait toujours par « je crois vraiment en ce projet, il FAUT le faire, toutes les personnes à qui j’en parle sont enthousiastes, c’est le moment pour que les choses changent, je veux faire ma part dans ce changement »
Alors, grâce au collectif, grâce au soutien de nos proches, grâce aux rencontres, grâce à la persévérance du groupe, grâce à notre patience et nos échanges :
ON Y EST !
Et ça fait du bien !
Félicitations pour la persévérance, la foi contre vents et marées, et gratitude pour tout le soutien actuel et à venir.
Avec autant d’enthousiasme ce projet ne peut qu’aboutir. On vous souhaite de faire que des enfants heureux d’aller jouer dans la cabane sans s’apercevoir qu’ils sont à l’école. C’est génial 🙂